New Skin (Hannah De Meyer / Théâtre de la Bastille)

(de quoi ça parle en vrai)

« À l’orée de la représentation, Hannah De Meyer entame une chanson pour faire sienne l’indignation d’auteurs et autrices féministes, écologistes et décolonialistes. Pour autant, New Skin procède moins par citations que par perturbations : Hannah De Meyer cherche à éprouver la manière dont les récits alternatifs de Judith Butler, Achille Mbembe et Donna Haraway peuvent habiter son corps. Sa présence est à la fois poreuse et insécable, comme un éclat de roche brillante et hypnotique. Les visions s’enchâssent, pleines de colère et de tendresse, cheminant jusqu’à la caverne d’une divinité féminine originelle. L’espace scénique se fait alors organique, telle une cellule qui se dilate et se rétracte, contenue dans le corps de l’artiste puis s’élargissant pour envelopper le public. » (source : ici)

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© Hannah De Meyer

(ceci n’est pas une critique, mais…)

Ce samedi 12 octobre, j’ai vu trois spectacles d’affilée. Paris s’est donné pour moi des airs de Festival d’Avignon. Mal m’en a pris puisque j’ai dérogé à ma règle de ralentir et à la fin de la soirée, j’avais la certitude suivante : aucun des trois spectacles ne m’avait véritablement enthousiasmé. Je voyais les qualités, mais certains défauts venaient entacher cette envie de partager, de recommander tel ou tel spectacle.

Vingt-quatre heures plus tard, malgré un texte (dit en français) que je n’ai saisi que par fulgurances (les moments sur la conception et la naissance, par exemple), c’est ce spectacle-là qui me reste en mémoire : New Skin.

Parce que Hannah De Meyer présente un spectacle original et hypnotique. Je me souviens avoir dit au camarade que j’ai rejoint un peu plus tard dans la soirée pour « Le Mariage » (prochainement dans ces mêmes colonnes) : « Je crois qu’elle l’aurait fait en flamand non sur-titré ou avec des grommelos, j’aurais presque plus apprécié. » Il faudrait peut-être voir cette création deux fois, pour appréhender ce travail corporel (proche de la danse) et sonore assez incroyable dans un premier temps, puis comprendre ce qui est dit.

Hannah de Meyer est un corps. Elle dit des mots, on la sent vivre ses mots, elle se meut dans l’espace, change de rythme, ses gestes calculés pourraient en fait presque se passer de mots (même si ce sont ces mots qui déclenchent tout, c’est contradictoire, je sais). Mais pas de sons (je veux dire, on ne pourrait pas s’en passer)

Ce que l’artiste fait avec ses moyens (un micro, les hauts-parleurs du théâtre) m’ont rappelé le chef d’oeuvre de Simon McBurney « The Encounter » dans lequel le dramaturge anglais nous emportait en Amazonie à l’aide d’un système phonique de haute volée (nous étions munis d’un casque audio, nous n’entendions que la voix de McBurney et les différents bruitages qu’il lançait, en « mode 3D »).

Une belle découverte que cette Hannah De Meyer (même si, la prochaine fois, il faudra que je lise la note d’intention pour apprécier pleinement son travail).

 

NEW SKIN

Spectacle de Hannah De Meyer

Texte et interprétation Hannah De Meyer

Regard extérieur Jesse Vandamme – Son Niels Van Heertum et Frederik Leroux – Lumière Peter Missotten

Jusqu’au 16 octobre 2019 au Théâtre de la Bastille (Paris) et le 7 mars 2020 au Quartz (Brest)

(ce spectacle est présenté dans le cadre du temps fort  P.U.L.S. Initié en 2017 par Guy Cassiers et le Toneelhuis — le Théâtre de la Ville d’Anvers — P.U.L.S. est d’abord un dispositif artistique qui favorise l’accompagnement et l’accès aux grands plateaux pour de très jeunes artistes)

 

(une autre histoire)

Salle du haut du théâtre de la Bastille,

Je m’assois en bout de rang. Je suis le premier arrivé dans la salle. Je m’assois en bout de rang, parce qu’après New Skin, je dois descendre dans la salle du bas pour ma troisième pièce de la journée, le Mariage, récupérer au vol mon alter-ego théâtral qui ne me ressemble en rien (trop longue histoire) et tenter de ne pas s’asseoir sur un strapontin.

J’espère que la pièce n’aura pas de retard. J’espère que la pièce ne sera pas trop bonne, parce que si la pièce est trop bonne, ça va applaudir à n’en plus finir et je n’oserai jamais me lever alors que les autres spectateurs applaudissent l’artiste. Pis, l’artiste, elle me verra si je me lève avant tous les autres. Elle pensera que je me lève parce que j’ai adoré son travail, mais comme je descendrai les marches, elle pensera que je n’ai pas aimé, donc je me ferai remarquer en partant tout en continuant à applaudir, ce qui est le comble du ridicule, parce que si ça te plait, tu restes à ta place, point. Deux saluts… trois saluts… Trois saluts, c’est correct. Quatre, ça commence à faire… Si je m’arrête d’applaudir, peut-être lancerai-je le mouvement ? Peut-être que ne suis-je pas le seul dans ce cas-là ? D’autres spectateurs, comme moi, doivent être invités au Mariage d’après Gombrovicz ? Où êtes-vous ? On fait comment ? Si j’étais dans Star Trek, je me téléporterais directement, sans gêner qui que ce soit. « Beam me up, Jean-Marie ! » (c’est le prénom du directeur du théâtre, je préfère préciser)

Un jour, j’aurai ma place réservée au théâtre de la Bastille, ô oui, un jour j’aurai un fauteuil à mon nom !

 

Vu le samedi 12 octobre à 19h30 au Théâtre de la Bastille (Paris)

Prix de ma place : 13€ / mois (Pass Bastille)

Textes (sauf mention contraire) : Axel Ito

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