Le Direktør (Oscar Gómez Mata / Théâtre de la Bastille)

(quand on ne lit pas la bible)

Le Direktør ? Oh, une adaptation d’un film, comme c’est original ! Je me souviens, il y a très longtemps, d’une interview de Jodie Foster dans laquelle elle évoquait les nouvelles pistes d’adaptation au cinéma comme les chansons (prochainement dans les salles obscures : « Je danse le mia » coscénarisé par Michael Youn). Bientôt, au théâtre, l’adaptation par votre serviteur de cette chanson – .

(de quoi ça parle en vrai)

« Ravn dirige une entreprise de nouvelles technologies. Trop lâche pour assumer ses décisions impopulaires, il se fait passer pour un simple salarié et invente de toutes pièces l’existence d’un « Directeur de tout » exerçant aux États-Unis. Lorsqu’il faut vendre l’entreprise, puis licencier ses salariés, il ne reste plus à Ravn qu’à engager un comédien qui incarnera ce directeur imaginaire. Prenant malheureusement son rôle trop au sérieux, le jeune comédien décide vite de s’affranchir, précipitant les employés dans une série de quiproquos improbables. » (source : ici)

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© Steeve Luncker

(ceci n’est pas une critique, mais…)

J’ai vu tous les films de Lars Von Trier. Il m’a parfois agacé (Antichrist), ébloui (Melancholia), bouleversé (Breaking the Waves), fasciné (L’hôpital et ses fantômes) mais je ne peux pas dire que le film « Le Direktør » m’ait laissé un souvenir impérissable, même si je me souvenais de l’argument principal.

Oscar Gómez Mata laisse libre court à la folie de sa troupe, David Gobet en tête, qui interprète un faux directeur de tout, adepte des préceptes du fameux (et fictif) dramaturge Gambini (et que je fus heureux de revoir après une autre adaptation cinématographique, celle de la Maman et la Putain, version Dorian Rossel). Oui, c’est drôle, c’est parfois idiot (clin d’oeil), les comédiens jouent face au public par le truchement d’adresses directes, pour nous faire comprendre que l’entreprise et le théâtre ne sont pas si éloignés.

Je regarde ma montre. Une heure est passée. Nous sommes à mi-chemin. C’est là que le bât blesse, car la machine va tourner à vide. Les scènes s’éternisent, certains comédiens sont en roue libre (notamment dans les « passages méta-théâtraux », quand Christian Geffroy Schlittler (Ravn, le vrai directeur) devance la critique en avouant que c’est trop long ou quand il « affiche »  à deux reprises un spectateur endormi au premier rang.). La pièce aurait gagné à être resserrée.

Et surtout en lisant la note d’intention après la pièce, je me suis demandé si je n’étais pas passé à côté de quelque chose de plus sérieux ou dénonciateur, là où je n’ai vu qu’une farce.

En résumé, j’ai beaucoup ri à la vision de cette pièce (j’avoue une fascination pour Camille Mermet qui interprète une Heidi A. lunaire et hypersensible), mais un peu vaine.

 

LE DIREKTØR

Avec Pierre Banderet, Valeria Bertolotto, Claire Deutsch, Vincent Fontannaz, Christian Geffroy Schlittler, David Gobet, Camille Mermet, Aurélien Patouillard et Bastien Semenzato

D’après Direktøren for det hele de Lars von Trier

Mise en scène et adaptation Oscar Gómez Mata

Assistant à la mise en scène Jean-Daniel Piguet – Création lumières et direction technique Roberto Cafaggini – Création et régie son Fernando de Miguel – Scénographie Daniel Zamarbide…

 Jusqu’au 4 avril 2019 au Théâtre de la Bastille, Paris

 

(une autre histoire)

Une fois n’est pas coutume, je ne vais pas tout seul au théâtre. J’ai rendez-vous à 45 avec une amie, je l’attends devant la porte de gauche, je suis dans les starting-blocks. Evidemment, elle arrive en retard, je perds mon avantage, laisse passer les gens qui vont sûrement prendre ma place. La prochaine fois, je lui dirai de venir à 40.

Une fois n’est pas coutume, je parle avec des gens après le spectacle, et pas seulement avec l’amie en retard. On échange nos impressions sur le spectacle. Quelqu’un tourne autour de nous. Il me regarde bizarrement. La rue de la Roquette est connue pour abriter un grand nombre de personnages hauts en couleur. Une fois, un gars promenait son vélo sur la roue arrière et faisait exprès de me frôler. J’avais fait comme s’il n’existait pas. « Comédien ! », dit le narrateur avec emphase.

Celui qui me regardait avec insistance m’interpelle :

– Gwenaël ?

– Euh… Non ?

– Vous n’êtes pas Gwenaël Morin ? Pourtant vous lui ressemblez. Vous ne trouvez pas que Monsieur ressemble à Gwenaël Morin ? Parce que la première fois que je l’ai rencontré, c’était ici, au Théâtre de la Bastille, avce une de ses pièces. Je vous prie de m’excuser. Vous lui ressemblez vraiment !

– Pas de souci, ça aurait pu être pire !

Je me souviens vaguement du visage et de la carrure de ce metteur en scène dont j’avais adoré le travail l’été dernier à Bussang. Je cherche sur mon téléphone intelligent. Certes le monsieur a une barbe comme moi mais je vois surtout qu’il a dix ans de plus que moi. Je ne peux estimer si c’est lui qui fait plus jeune ou bien moi qui… Ou bien moi qui… Putain, ça y est, je fais vieux ! Je comprends mieux pourquoi les gens hésitent à deviner mon âge. Quel jeu stupide ! Je fais mon âge et bien plus encore. Ma crise de la quarantaine s’en trouve renforcée. J’ai déjà l’impression de passer à côté de ma vie, si en plus je fais plus vieux que ce que je suis… Je… Je… Mais que vais-je devenir ?

 

Vu le mercredi 13 mars 2019 au Théâtre de la Bastille, Paris.

Prix de ma place : 13€ / mois (Pass Bastille)

Textes (sauf mention contraire) : Axel Ito

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