Le Théâtre et son Double (Antonin Artaud / Gwenaël Morin / Nanterre Amandiers)

(de quoi ça parle en vrai)

« Après ses relectures de grands classiques (Molière, Shakespeare, Sophocle, Racine…), Gwenaël Morin s’empare du Théâtre et son double d’Antonin Artaud en se donnant comme point de départ le manifeste du « théâtre de la cruauté ». Sous une immense bulle blanche dans laquelle sont installés comédiens et spectateurs, le metteur en scène interroge son expérience à la lumière des théories d’Artaud jusqu’à détruire son propre travail, à la recherche d’un autre théâtre sous les ruines… » (source : ici)

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Photo de couverture : Martin Argyroglo – Photo ci-dessus : Richard Sammut

(ceci n’est pas une critique, mais…)

Gwenaël Morin apparait parmi nous et tente de se frayer un chemin en portant un livre factice, aussi grand que lui, « Le Théâtre et son double » d’Antonin Artaud, qu’il posera ensuite à terre, tel le monolithe de « 2001 l’Odyssée de l’Espace ».

Avant d’aller plus en avant dans cette chronique, je me dois de signaler que nous ne sommes pas dans une salle de spectacles ordinaire. Après le discours du personnel du théâtre dans le hall, les spectateurs sont invités à sortir du théâtre et de suivre le mouvement, telle une procession en direction d’un lieu saint. Nous pénétrons alors dans une bulle blanche (l’oeuvre du maître des lieux, Philippe Quesne). Ici aucun siège, nous pouvons rester debout ou nous asseoir par terre. On prend une petite photo, on lève les yeux au ciel, un grand lustre et cette toile blanche encore immaculée (c’est la première) seront les seuls décors de cet essai.

Pour vous dire la vérité, je n’ai jamais lu Antonin Artaud. Je connaissais son regard, son visage, son tempérament, son lien avec la psychiatrie, mais je n’avais jamais eu le courage de lire ses mots. Les comédiens présents sur le plateau sont bien courageux de se coltiner les mots du Mômo. (le terme « se coltiner » est peut-être mal choisi, mais je n’en vois pas d’autre, tellement certains passages sont d’apparence incompréhensibles (dits par Lucie Brunet) ou impressionnants de force (dits dès l’ouverture par Richard Sammut).

Avec Gwenaël Morin, on ne sait trop sur quel pied danser, comme si de toute évidence, il était impossible d’adapter « Le Théâtre et son double » (d’ailleurs est-ce qu’on l’adapte ?). Le metteur en scène prend le parti pris d’un work in progress, dans lequel il prend également part, en intimant aux comédiens tel mouvement ou telle approche en direct. Ainsi, il n’hésitera pas à recommencer une certaine scène dans la dernière partie du (court) spectacle à cause de la soufflerie du lieu. Car Gwenaël Morin n’oublie pas où il est : tantôt lieu quasi religieux dans lequel on se recueille pour écouter sagement la parole d’Artaud (d’ailleurs, on ne tardera pas à se lever comme à la messe, à frapper dans ses mains comme pour un Gospel… ). Les comédiens ne tarderont pas à invoquer l’esprit d’Anton15 (oui, parce que les Marseillais, donc moi, on dit Antonin avec un « in » à la fin, et pas « un », or ici, c’était la blague d’Antonin dit AntonUn, vous me suivez ?) (parenthèses beaucoup trop longues, ça faisait longtemps) Où en étais-je ? Tantôt théâtre en chantier (qui ressemble à une ruine, comme le fait remarquer Manu Laskar). Gwenaël Morin sait qu’il a un spectacle à mener, d’Antonin Artaud qui plus est, dans un lieu qui connaitra des bouleversements et dont nous ne connaissons pas encore l’issue (je vous invite à consulter ce lien qui vous explique tout : ici).

Les comédiens font vivre littéralement cette grande bulle blanche. (j’avais noté cette phrase, je n’ai pas su où la placer, donc la voici, comme un cheveu sur la soupe – surtout que je me refuse de dire comment ils font, donc cela n’a aucun intérêt, vous pouvez l’effacer de votre mémoire)

Le Théâtre et son double est un objet atypique (forcément), qui manquerait peut-être de folie (mais c’était la première et c’est une création – la tension était palpable) mais qui fait encore des échos dedans ma tête. Une expérience intense qui désoriente, amuse  et étonne. La prochaine fois, je lirai Artaud et le programme de salle avant de voir le spectacle, promis.

 

LE THÉÂTRE ET SON DOUBLE

Conception et mise en scène Gwenaël Morin

Texte « Le Théâtre et son double », Antonin Artaud, Éditions Gallimard, 1938

Scénographie Philippe Quesne – Dramaturgie Camille Louis – Stagiaire Kay Zevallos-Villegas

Distribution Lucie Brunet, Lucile Delzenne, François Gorrissen, Manu Laskar, Nicolas Le Bricquir, Nicole Mersey-Ortega, Richard Sammut

Jusqu’au 28 mars 2020 à Nanterre Amandiers

 

(une autre histoire)

Antonin Artaud est né à Marseille. (comme moi. J’ai même passé mon bac au lycée portant son nom)

« La poésie, la mise en scène, la drogue, les pèlerinages, le dessin et la radio, chacune de ces activités a été un outil entre ses mains, « un moyen pour atteindre un peu de la réalité qui le fuit » (Une fois, j’ai écrit un poème, c’était pour ma bien aimée. J’attends toujours sa réponse. Une fois, j’ai mis en scène une pièce que j’ai écrite. Depuis je n’ai plus jamais mis en scène de pièces. Une fois, j’ai essayé la drogue. La drogue de l’amour bien sûr ! Et aussi un peu de crack à Stalingrad, de la coke, des amphét’ et de l’opium, mais seulement le dimanche et les jours fériés et entre midi et deux les jours de semaine. Une fois, j’ai fait un pèlerinage dans un monastère à Ganagobie. Je n’ai pas envie de faire de l’humour là-dessus, le nom Ganagobie suffit à lui-même. Une fois, j’ai fait du dessin. Ma maîtresse me dit alors qu’heureusement j’excellais en orthographe. Le mois prochain, je vais (normalement) animer une émission de radio, cela fait deux mois que j’écris mon introduction.)

Antonin Artaud était atteint d’un cancer du rectum. (non non… je ne dirai rien là-dessus non plus)

(merci Wikipedia)

 

Vu le mardi 10 mars 2020 à Nanterre Amandiers

Prix de ma place : 10€ (Carte Nanterre Amandiers)

Textes (sauf mention contraire) : Axel Ito

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