NORMALITO (Pauline Sales / le 11. Avignon / Avignon Off)

(de quoi ça parle en vrai)

« La maitresse demande à tous les élèves de sa classe de CM2 d’inventer leur superhéros. Lucas dessine Normalito le superhéros « qui rend tout le monde normaux ». Iris, enfant précoce, tente de se rapprocher de Lucas, elle qui aimerait tant devenir normale. Les deux enfants, que tout sépare, apprendront à se connaître. Le jeune duo va fuguer et rencontrer Lina, la dame pipi des toilettes de la gare. À travers cette fable sur la normalité et la différence, nous abordons la tolérance, l’empathie. Ne sommes nous pas tous différents et tous semblables ? » (source : ici)

© Arianne Catton Balabeau

(ceci n’est pas une critique, mais…)

D’abord une commande de Fabrice Melquiot à Pauline Sales : écrire sur les « supernormaux ». Comme une évidence, puis la promesse d’un spectacle de qualité. Ensuite une crainte, toujours la même, voir des acteurs adultes jouer des enfants de dix ans. Celle-ci est assez rapidement dissipée grâce au jeu nuancé de Cloé Lastère et au dynamisme d’Antoine Courvoisier (même si parfois un peu en force, j’ai trouvé). On y croit. On oublie aussi qu’ils sont sensés n’avoir que dix ans, mais on y croit quand même.

Toujours cette précision et cette ingéniosité dans la mise en scène de Pauline Sales, aidée cette fois-ci par la scénographie de Damien Caille-Perret, toute en portes qui grincent, de cuvette de toilettes roulante et de trouvailles étonnantes.

L’histoire se scinde en deux parties. Premièrement, ces deux solitudes qui ne se retrouvent pas dans leurs familles respectives, un brin caricaturales : le garçon normal dans une famille CSP+ bobo/écolo/machinchoso et la fille surdouée dans une famille tout droit sortie du roman de Roald Dahl « Matilda », qui regarde « Plus belle la vie » en mangeant des macaronis. Deuxièmement, la fuite, le jeu de cache-cache dans des toilettes publiques tenues par une certaine Lina, jouée finement par un Anthony Poupard étonnant, dans tous les sens du terme. Il faut s’habituer à cette rupture de ton et ce changement de direction dans la narration, mais au fond, on parle toujours du même sujet : C’est quoi être normal et/ou ordinaire ? D’abord, est-ce que ça existe ?

(et puis, mine de rien, ça aborde aussi le thème de la transsexualité, toujours avec sensibilité et sans en rajouter)

A la fin, on applaudit, on sourit. Purée, j’ai souri ! Je crois que j’étais content.

NORMALITO

Texte et mise en scène Pauline Sales

Avec Antoine Courvoisier, Anthony Poupard, Cloé Lastère

Régie lumière Grégoire de Lafond et Xavier Libois – Régie son Christophe Lourdais et Fred Buhl – Scénographie Damien Caille-Perret – Costumes Nathalie Matriciani – Lumière Jean-Marc Serre – Son Simon Aeschimann – Maquillage/Coiffure Cécile Kretschmar

Production Théâtre Am Stram Gram (commande de Fabrice Melquiot) – Genève et A L’ENVI – Coproduction Le Préau CDN de Normandie – Vire 

Jusqu’au 29 juillet 2021 au 11. Avignon (Avignon OFF) et en tournée, : notamment à Paris aux Plateaux Sauvages (les 1e et 2 octobre), à Brest (7 et 8 octobre), Caen (15 et 17 décembre), Lyon (du 10 au 14 mai 2022)…

(d’autres histoires)

* Je suis un homme blanc, hétérosexuel, cis (je crois que c’est comme ça qu’on dit), d’âge aujourd’hui moyen, gagnant ma vie correctement, même si c’est pas ouf. Je ne suis ni trop beau ni trop laid, je suis également d’intelligence moyenne, contrairement à ma pilosité qui ne l’est pas. Et pourtant je ne me trouve pas normal. C’est normal, docteur ?

* Avant d’arriver, je vérifie mon courriel de confirmation. Je remarque que j’ai demandé une place pour le vendredi 18 juillet – nous sommes le samedi 17. L’attaché de presse m’a réservé une place pour le dimanche 18 – nous sommes toujours le samedi 17. Je sue, j’angoisse. Je dois voir la pièce avec une amie, mais comment vais-je faire ? J’ai mal au ventre, impossible d’aller aux toilettes. Il est 9h30, je n’irai qu’en rentrant à l’hôtel vers 1h du matin. Oui, je sais, je sais, ne me regardez pas avec des yeux comme ça ! Tout rentre dans l’ordre, j’ai finalement ma place, grâce à une personne en charge, conciliante. Je me fais toute une histoire pour pas grand chose, c’est normal, docteur ?

* L’ongle noir, sur le deuxième orteil, c’est normal, docteur ? Mes insomnies, ces rêves où je rêve toujours de la même personne, ma vessie… oui non ça je sais… mon absence d’envie de rencontrer des nouvelles personnes, des pertes de mémoire, et pas que les mots, ces absences, ces oublis, cette façon de répéter trois fois les mêmes choses, mais en employant des mots différents, c’est normal, docteur ?

Vu le samedi 17 juillet 2021 au 11. Avignon (Avignon OFF)

Prix de ma place : invitation

Textes (sauf mention contraire) : Axel Decanis

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